Covid-19 : les leviers pour sortir de l’épidémie
15 janvier 2021

Covid-19 : les leviers pour sortir de l’épidémie

Quand et comment va-t-on sortir de cette crise sanitaire mondiale ? Le vaccin est une solution, si 67 à 70% de la population française se fait vacciner. Comment peut-on économiser les doses de vaccins ? Le Pr Philippe Amouyel, professeur de santé publique à l’Université de Lille, nous éclaire sur le sujet. 

C’est un peu la question à un million de dollars… Quand va-t-on enfin sortir de cette épidémie de Covid-19 qui nous gâche la vie ? A deux jours des nouvelles annonces du gouvernement, les perspectives ne semblent pas réjouissantes. Les cas repartent à la hausse et un nouveau cluster a été identifié à Marseille autour d’un patient porteur de la nouvelle souche.
Dans ce contexte, de quelles solutions disposons-nous pour entrevoir la fin de la pandémie ? Les réponses du Pr Philippe Amouyel, professeur de santé publique à l’université de Lille.

Le vaccin, c’est la sortie de l’épidémie garantie ?

Pr Philippe Amouyel. Oui mais à certaines conditions. Pour que tout ça soit derrière nous, il faudrait que 67 à 70 % de la population française soit vaccinée. Or, au 9 janvier, nous n’en étions qu’à 0,04 % (80 000 doses injectées) quand d’autres pays comme Israël en étaient déjà à 20 % (1,7 millions de doses).
La vaccination, ce n’est plus un problème scientifique ou médical ; c’est désormais une problématique logistique. Il faut que tous les volontaires puissent se faire vacciner, au-delà des personnes âgées en Ehpad et des soignants. Pour ce faire, il est nécessaire d’organiser cela via les centres de vaccination, de décentraliser et de gérer la vaccination avec les élus locaux pour accélérer le mouvement. Si on doit attendre les avis de la Direction générale de la santé, on n’a pas fini.

Mais il n’y pas de vaccins pour tout le monde…

Pr Philippe Amouyel. Il y en a plus qu’on ne le pense. La France a commandé 200 millions de doses ; comme il en faut 2 pour s’immuniser, ça fait 100 millions. Là-dessus, on prévoit des pertes à hauteur de 40 %, liées à la manipulation, mais il peut y en avoir beaucoup moins.
En fait, il faut savoir que les vaccins de Pfizer sont conditionnés en bouteilles prévues pour 5 doses, mais il y en a toujours un peu plus dedans. Avec une bonne préparation, on peut en faire une sixième - et les manipulateurs ont bien ça en tête. Du coup, ça fait 20 % de doses en plus ! Seuls les centres de vaccination sont aptes à savoir s’il y a des excès de produits. Localement, on pourrait utiliser les « fonds de bouteille » pour vacciner les volontaires qui seraient inscrits sur une liste. C’est une piste pour accélérer la vaccination.

Les enfants seraient de grands transmetteurs… faut-il fermer les écoles ?

Pr Philippe Amouyel. Les études ne sont pas unanimes là-dessus. Ce qui est sûr, c’est que l’impact psychosocial de la fermeture des écoles est trop important (décrochage scolaire, creusement des inégalités…) ; on ne peut pas se le permettre. La problématique des écoles est semblable à celle des commerces. On sait qu’avec la combinaison des 4 gestes barrières (masque, lavage des mains, distanciation, aération), on bloque le virus à 80 %.
La réouverture des commerces avec des protocoles stricts n’a pas été associée à une hausse des cas. Donc on peut poursuivre une activité, scolaire ou commerciale, sans faire flamber l’épidémie. Il faut peut-être renforcer les protocoles dans les écoles : mieux tester les enseignants (qui sont plus contaminants, car c’est eux qui parlent beaucoup) ; éviter les cantines et manger en salle de classe son sandwich déjà préparé ; éviter les attroupements de parents à la sortie des classes…

Du coup, on pourrait aussi rouvrir les bars, restos et lieux culturels ?

Pr Philippe Amouyel. Malheureusement, les études menées dans les grandes métropoles américaines montrent que la progression de l’épidémie était liée à l’agglutination des gens dans les bars et restos. Ce qui semble marcher, c’est plutôt le métro-boulot-dodo : le couvre-feu avancé, ça fonctionne. Maintenant, on peut envisager des réouvertures avec des protocoles spécifiques : un bar sur deux, jauges limitées etc. Les modèles permettant de prévoir cela sont en train d’être mis en place. Par exemple, une nouvelle étude menée à l’opéra de Barcelone n’a détecté aucun cas de contamination ; les gens étaient testés à l’entrée et respectaient un protocole strict. Il est donc possible de libérer les choses. Mais bon, actuellement, l’analyse des eaux usées tend plutôt à montrer qu’on va subir un nouveau pic, celui du nouvel an. Pas sûr, du coup, que les annonces aillent dans le sens d’une libéralisation.

En cas de symptômes ou de contact avec un cas avéré, un arrêt de travail est automatiquement délivré, sans délai de carence ni consultation médicale. Plus d’info sur https://declare.ameli.fr/assure/conditions