Cancer du sein : le dépistage est-il vraiment efficace ?
30 septembre 2020

Cancer du sein : le dépistage est-il vraiment efficace ?

L'intérêt du dépistage organisé du cancer du sein est controversé. Réponses aux principales critiques à la veille d'Octobre Rose.

Tous les ans, à l’occasion d’Octobre Rose, c’est le retour de la controverse et de la question essentielle : faut-il, oui ou non, participer au dépistage organisé du cancer du sein ? Toutes les femmes de 50 à 74 ans sont en effet invitées à réaliser une mammographie tous les 2 ans.
Objectif : dépister les cancers au stade précoce pour mieux les traiter. Mais des voix dissonantes se font entendre. Elles remettent en cause l’utilité de ce dépistage, et dénoncent même ses effets délétères. D’ailleurs, moins de la moitié des femmes concernées participe à cette campagne nationale.
Quels sont leurs arguments, et qu’en penser ? Le point avec le Dr Jean-Baptiste Méric, oncologue et directeur du pôle santé publique et soins de l'Institut national du cancer.

Certains disent que le dépistage, ça ne fait pas baisser la mortalité. Vrai ou faux ?

Certes, il existe des études qui montrent l’absence d’effet du dépistage sur la mortalité liée au cancer du sein. Mais il faut se baser sur l’ensemble des études. Or, avec les revues de littérature [qui évaluent toutes les études sur le sujet, ndlr], on obtient une estimation réaliste de l’ordre de 15 % de réduction de la mortalité. Quand on sait que 2,5 millions de femmes sont dépistées chaque année, ça fait une quantité non négligeable de morts évités.

Avec le dépistage, on traite des petites tumeurs qui auraient pu rester bénignes… Ne vaut-il pas mieux attendre les premiers signes cliniques ?

On a des informations pour comparer le type de tumeurs identifiées lors du dépistage organisé, par rapport aux tumeurs décelées à la suite de signes cliniques. Or, il apparaît que dans le cadre du dépistage, 77 % des femmes atteintes de cancer ont une tumeur localisée, qui nécessite des traitements moins lourds, contre 60 % tous cas confondus. Par ailleurs, hors dépistage, 70 % des femmes atteintes de cancer ont une chirurgie conservatrice du sein, contre 82 % dans le cadre du dépistage organisé. A l’inverse, hors dépistage, 1 patiente sur 2 doit subir une chimiothérapie, contre un tiers dans le cadre du dépistage.

Mais le dépistage n’amène-t-il pas à un surdiagnostic ?

Il y a effectivement un surdiagnostic, évalué aux alentours de 10 %. Mais ça, c’est une vision en population générale… Face à une femme, on n’a aucun moyen de prédire l’évolution de la tumeur, d’où la nécessité du dépistage précoce. Une autre piste, c’est de personnaliser le dépistage en fonction de caractères génétiques ou d’autres facteurs de risque. Pour ces profils, on pourrait augmenter la fréquence des examens, et la diminuer pour les autres. On réduirait ainsi le risque de surdiagnostic.

Quid des radiations induites par les mammographies à répétition ?

Les radiations émises par une mammographie s’établissent à 0,70 millisievert. Quand on passe une radio des vertèbres, pour un lumbago par exemple, c’est 2,4 millisieverts. On sait que sur 100 000 femmes dépistées, les radiations pourraient être responsables d’1 à 10 décès. Mais on évite 200 à 350 morts par cancer… Donc la balance bénéfice-risque est largement favorable.

Participer au dépistage relève du choix personnel de chaque femme. La clé pour décider, c’est l’information éclairée. Un site ? www.cancersdusein.e-cancer.fr