Activité physique, nutrition : le grand virage de la prévention
7 décembre 2021

Activité physique, nutrition : le grand virage de la prévention

Depuis l'arrivée du Covid, les Français et Françaises semblent se préoccuper davantage de leur santé physique et de ce qu'ils mettent dans leurs assiettes. Serge Guérin, sociologue, évoque cette prise de conscience et ses conséquences sur notre quotidien.

La question est de plus en plus présente dans l’esprit des Français : comment se protéger des virus et prendre soin de sa santé ? Un sondage réalisé par Elabe pour la Fondation PiLeJe (1) et l’Institut Pasteur de Lille montre que pour un nombre croissant de personnes, la prévention individuelle est une arme déterminante : 97 % des sondés plébiscitent l’alimentation saine pour rester en bonne santé, et 96 %, l’activité physique - un bond de 15 points par rapport à 2020 ! Consulter son médecin régulièrement est jugé utile par 83 % des répondants, soit 56 % de plus par rapport à l’année précédente. Comment la crise sanitaire a-t-elle renforcé nos préoccupations vis-à-vis de notre santé ? Qu’en est-il en pratique ? L’analyse du sociologue Serge Guérin.

(1) Sondage réalisé auprès d’un échantillon de 1 001 personnes, représentatif des résidents de France métropolitaine âgés de 18 ans et plus.

Un autre rapport à notre santé a-t-il émergé ?

Serge Guérin. Il y a une prise de conscience vis-à-vis de notre santé, qui a été amorcée ces dernières années et que le Covid a accélérée. Les gens ont compris qu’ils avaient un rôle direct à jouer pour prévenir les maladies, qu’ils sont responsables de leur santé et que les solutions ne sont pas forcément externes.
La crise a renforcé notre sentiment de fragilité, et a remis sur le devant de la scène la question du bien-être (l’alimentation, l’activité physique…).
On réalise aussi que dans une société où l’on demande beaucoup de performance, être en bonne santé est une nécessité (pour garder son travail, par exemple).
Enfin, ce sondage montre que la perte d’autonomie et les maladies neurodégénératives font très peur, en particulier chez les plus jeunes. Cette peur est un levier qui contribue à la prise de conscience.

Cette prise de conscience se traduit-elle par des actes ?

Serge Guérin. C’est là où il faut apporter des nuances, car entre la prise de conscience, la décision et le maintien de la décision, il y a beaucoup d’étapes parfois difficiles à franchir. Ce qui apparaît dans les discours l’est un peu moins dans les actes : en 25 ans, les moins de 25 ans ont diminué de 25 % leur niveau d’activité physique ! Par ailleurs, plus le niveau de catégorie sociale est élevé, plus il est facile d’avoir cette prise de conscience vis-à-vis de notre santé, et de s’engager dans une démarche préventive. Au niveau organisationnel, les citoyens ne sont pas poussés à la prévention ; nos modes de vie sont de plus en plus sédentaires… ça n’aide pas à changer les comportements individuels.

Les messages de santé publique ont-ils rempli les objectifs ?

Serge Guérin. Ces messages sont trop généralistes et ne prennent pas en compte la diversité sociale et culturelle des individus. Ils ont aussi tendance à être infantilisants, dans le sens où ils donnent un ordre, en omettant les différentes habitudes et modes de vie.
Le rapport que chacun entretient à sa santé varie tellement, d’un individu à l’autre, d’une culture à l’autre… Aucun message généraliste ne saurait fonctionner.
Il faut essayer d’accompagner au plus près, en s’adaptant aux pratiques des uns et des autres, et en se focalisant sur les gains (économiques, santé…). Pour aider les gens à changer, il faut leur montrer les intérêts qu’ils peuvent y trouver.