Optimistes, actifs et connectés : les jeunes seniors sont épanouis
2 avril 2021

Optimistes, actifs et connectés : les jeunes seniors sont épanouis

Les seniors, c’est-à-dire les plus de 60 ans, sont très nombreux à trouver que la retraite leur va bien. Pourtant, un nombre important de personnes appréhendent de vieillir et de devenir inactif professionnellement. Le Dr Antoine Piau, gériatre au CHU de Toulouse, déconstruit les stéréotypes affiliés aux séniors, à la dépendance et à la maladie.

Bien dans leurs pompes. C’est ainsi qu’apparaissent les retraités dans une enquête de la France Mutualiste, qui croise les regards des plus de 60 ans avec celui des actifs âgés de moins de 60 ans.
Un sondage riche en enseignements, dans lequel les retraités se déclarent en bonne santé (82 %), disent faire de l’activité physique (79 %) et avoir une vision positive de leur retraite (87 %). Ils ont une vie sociale active, sont à l’aise avec les outils numériques (82 %) et échangent sur les réseaux sociaux (64 %).
Et si la famille et les petits-enfants restent une composante importante de leur vie, ce n’est pas la source principale de leur épanouissement. Ce qu’ils préfèrent, c’est plutôt voir leurs amis (50 %) ou leurs amants (56 %), bricoler, jardiner… Bref, profiter de leur temps libre.

Une vision très éloignée de la perception qu’ont les moins de 60 ans. Pour eux, l’âge de la retraite rime avec solitude (38 %), ennui (29 %) et dépendance (46 %). Les actifs estiment que la vieillesse démarre peu ou prou à la retraite - alors que les « jeunes seniors » situent la vieillesse aux alentours de 75 ans. Comment expliquer ce décalage de perceptions ?
Les réponses du Dr Antoine Piau, gériatre au CHU de Toulouse.

Les retraités se sentent en bonne santé… le constatez-vous en consultation ?

Dr Antoine Piau. Ce qui est sûr, c’est qu’il y a quelques décennies, l’âge de la retraite professionnelle correspondait à l’âge du début de vieillissement. Mais aujourd’hui, ce n’est plus le cas du tout : à 65 ans, on se sent souvent en pleine forme et on n’a aucune raison de ne pas se sentir comme tel, sauf si l’on est atteint de maladie. On le voit bien en gériatrie. Historiquement, c’est une spécialité qui prend en charge les personnes à partir de 65 ans. Mais aujourd’hui, la moyenne d’âge de nos patients se situe plutôt aux alentours de 85 ans. On n’a pas réactualisé notre vision de la vieillesse, on continue à la percevoir telle qu’elle était avant.

Pourquoi continue-t-on à associer la vieillesse à la maladie et à la dépendance ?

Dr Antoine Piau. D’abord, l’espérance de vie en bonne santé stagne… Quelque part, les craintes liées à la vieillesse ne sont pas infondées. Simplement, plus l’on est jeune, plus l’on a tendance à situer le début de la vieillesse tôt dans le temps. En fait, à 65 ans, on fait certes partie des seniors, mais on n’est ni vieux, ni dépendant - ou très rarement. Le problème tient aussi peut-être à la difficulté de catégoriser cette tranche d’âge. Il y a un mot pour désigner les nouveau-nés, les adolescents, les actifs, les jeunes mamans… Mais pas pour évoquer les différentes périodes qui composent ce qu’on appelle la vieillesse.

Comment expliquer cela ?

Dr Antoine Piau. Sous le terme « vieillesse », on trouve une très grande variété de situations. Entre 0 et 20 ans, on a en gros les mêmes caractéristiques, les mêmes compétences, on sait marcher, courir… Alors qu’à 75 ans, certains sont des marathoniens et dirigent des groupes de 10 000 personnes, quand d’autres sont déments, grabataires ou dépendants. Avoir une vision juste des plus de 60 ans est complexe, à cause de la grande hétérogénéité que l’on retrouve dans cette tranche d’âge. C’est une population qu’il est difficile de cibler ; elle est vite caricaturée ou cantonnée à la maladie.

Selon l’enquête, la retraite serait « un temps privilégié pour prendre soin de soi, voyager, être en contact avec ses proches ».