Alors que l’inactivité automobile, lors du premier confinement, a fait considérablement baisser les émissions polluantes présentes dans l'air, assiste-t-on à une diminution de certains polluants ?
Le Dr Gilles Dixsaut, médecin et président du comité d’Île-de-France contre les maladies respiratoires, nous répond.
Le confinement nous a tous mis à l’arrêt - en particulier celui de printemps 2020. Conséquence directe : le trafic automobile a été drastiquement réduit. Et avec lui, son lot de polluants.
Selon Santé Publique France, qui a modélisé l’impact de la pollution atmosphérique sur la santé des Français pendant le premier confinement, 2 300 décès ont été évités grâce à une moindre exposition de la population aux particules ambiantes. Quand on « veut », on peut ?
Ces chiffres nous montrent-ils qu’une voie d’action est possible pour réduire la pollution atmosphérique ?
Les réponses du Dr Gilles Dixsaut, médecin et président du comité d’Ile-de-France contre les maladies respiratoires, sont plus nuancées sur les bénéfices du confinement dans ce domaine.
Dr Gilles Dixsaut. Il est clair qu’en diminuant l’activité humaine, on réduit les émissions polluantes. Mais ces données sont en trompe l’œil : en fait, la pollution atmosphérique n’a pas diminué. Santé Publique France ne s’intéresse qu’aux PM2.5, qui ne sont pas les particules les plus dangereuses.
Les travaux que nous avons menés avec le CNRS sur la région de Paris montrent qu’il n’y a pas eu de diminution des P1, des particules plus fines et plus toxiques, issues des épandages agricoles. Les niveaux de P1 ont même été plus élevés pendant le premier confinement. Nous avons donc été exposés à des polluants très délétères pendant le confinement ; simplement, ils n’ont pas été mesurés dans l’étude.
Mais de notre côté, nous avons aussi pu observer la réduction de certains polluants, dont le dioxyde d’azote émanant des moteurs diesel. S’il n’y avait pas eu les épandages, effectivement, tous les indicateurs de la pollution atmosphérique auraient été au vert.
Dr Gilles Dixsaut. Comme le trafic autoroutier était à l’arrêt, les préfectures en ont profité pour autoriser les épandages. Car on sait que l’ammoniac issu des épandages interagit avec le dioxyde d’azote émanant des diesels pour produire des particules encore plus fines et plus toxiques.
Mais les préfectures n’ont pas tenu compte des conditions météorologiques, de l’absence de vent, de la situation anticyclonique... Du coup, on a eu des épandages importants et des microparticules qui ont longtemps stagné, augmentant ainsi les niveaux de pollution atmosphérique.
Les travaux du CNRS sur la région de Paris montrent qu’il n’y a pas eu de diminution des P1, des particules plus fines et plus toxiques.
Dr Gilles Dixsaut. D’abord, il faudrait modifier la réglementation qui, pour fixer des seuils, des alertes, des valeurs limites, ne prend en compte que les PM10. Ces particules n’ont pas un grand intérêt car il en existe de bien plus fines et toxiques. Nous avons réussi à intégrer les PM2.5 à la réglementation, mais ce n’est pas assez.
Par ailleurs, les épandages ne devraient être autorisés que lorsque les conditions atmosphériques le permettent. Et quand les épandages sont lancés, il faudrait interdire les moteurs diesel, à cause de la réaction chimique qu’ils induisent avec les pesticides. Evidemment, limiter les épandages, ce serait bien aussi.
Dr Gilles Dixsaut. Les conseils que l’on donne habituellement permettent de réduire les risques liés à la pollution automobile : s’éloigner le plus possible des axes routiers ; ne pas faire de l’activité physique aux heures de trafic ; aérer son logement plusieurs fois par jour aux heures de moindre circulation…